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Tom Cruise : «Le bonheur, c'est, pour
moi, une vie sans mensonge et une succession de moments
intenses». (DR)
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Tom Cruise tombe
le masque
Producteur et interprète, il navigue entre rêve et réalité
dans «Vanilla Sky» de Cameron Crowe. Dans cette comédie
dramatico-fantastique, remake d'«Ouvre les yeux» d'Alejandro
Amenabar, l'acteur incarne un homme séduisant et fortuné. Mais après
un accident de voiture, il se retrouve défiguré.
Brigitte Baudin, avec à Los Angeles Marianne Ruuth
Publié le 22 janvier 2002
Il paraît lisse, limpide, sans aspérité. Il a tout du gendre idéal
avec son sourire lumineux, son regard franc et son apparente désinvolture.
En fait, Tom Cruise est tout en lumières et en ombres. Sa
personnalité est complexe, secrète, énigmatique. Une enfance
difficile lui a laissé des bleus à l'âme, un manque d'assurance
et de confiance en soi. Pour lui, rien n'est acquis. Tout est à
conquérir de haute lutte. Son credo: le travail, le travail, le
travail.
C'est un perfectionniste en quête de la pierre philosophale, un
joueur se lançant sans cesse des défis. Ses films, ses rôles le
prouvent. N'a-t-il pas été tour à tour l'étudiant de Princeton
qui tourne mal dans Risky Business de Paul Brickman, le
pilote d'élite de Top Gun de Tony Scott, le vétéran du
Vietnam alcoolique et paralytique de Né un 4 juillet d'Oliver
Stone, un as du billard dans La Couleur de l'argent de Martin
Scorsese, le frère d'un autiste (Dustin Hoffman) dans Rain Man de
Barry Levinson, le yuppie de La Firme de Sydney Pollack ou le
mari jaloux perdu dans le monde du sexe de Eye Wide Shut de
Stanley Kubrick ?
Aujourd'hui, Tom Cruise relève un nouveau challenge. Il est
producteur et interprète (au côté de Penelope Cruz et Cameron
Diaz) de Vanilla Sky (un titre emprunté aux ciels vanille de
Monet) de Cameron Crowe, le remake d'Ouvre les yeux du réalisateur
espagnol Alejandro Amenabar. Dans cette comédie
dramatico-fantastique, il incarne David Aames, un éditeur
new-yorkais séduisant, fortuné mais très seul en dépit de ses
nombreuses conquêtes. A la suite d'un accident de voiture, il se
retrouve défiguré et obligé de porter un masque. Pas de chance.
Il venait enfin de rencontrer l'amour en la personne de Sofia
(Penelope Cruz), une immigrée aux dents longues...
«Je voulais à nouveau tourner avec Cameron Crowe, explique
Tom Cruise. J'avais gardé un excellent souvenir de notre
collaboration, cinq ans auparavant, dans Jerry Maguire. Il
est intelligent, humain. J'aime sa manière d'écrire, sa vision des
choses. C'est aussi un formidable directeur d'acteurs. Il vous
pousse à vous dépasser. A relever de nouveaux défis donc à
progresser. Cela me plaît! Cameron nous a montrés, à Paula Wagner
(avec qui j'ai fondé une maison de production) et à moi, Ouvre
les yeux, le film d'Alejandro Amenabar sur les trahisons de la réalité,
reprend-il. Le sujet nous a emballés. Nous lui avons donc
donné notre feu vert. L'univers d'Amenabar nous plaisait. Nous
avons ensuite produit Les Autres, un terrifiant thriller dont
l'héroïne est magnifiquement campée par Nicole Kidman.» Une
histoire de famille somme toute.
Penelope Cruz, la pétulante et nouvelle compagne de Tom Cruise
depuis son divorce, en janvier 2001, d'avec Nicole Kidman,
appartient aussi à l'univers d'Alejandro Amenabar. Elle interprétait,
en effet, dans la version originale, le personnage d'une jeune et
insouciante noctambule. Lorsqu'elle a eu vent du projet de remake,
elle s'est donc tout naturellement proposée pour le rôle de Sofia.
Après avoir séduit Matt Damon (sur le tournage de De si jolis
chevaux ) et Nicolas Cage (sur Capitaine Corelli
), il ne restait plus qu'à la ravageuse interprète
d'Almodovar (Tout sur ma mère) de charmer Tom Cruise.
Mission accomplie. Elle joue, à l'écran comme à la ville, son rôle
à la perfection.
Tout au bonheur de revivre une belle histoire d'amour, Tom Cruise
s'est investi dans ce film très personnellement et à plus d'un
titre.«Incarner quelqu'un de défiguré à la suite d'un
accident n'a pas été ma motivation première, avoue-t-il. Ce
qui me plaisait par contre dans le personnage c'est son évolution
constante. Il sort petit à petit de sa léthargie, de son trop
grand confort. Il s'éveille à la vraie vie en prenant conscience
de ses responsabilités envers lui-même et autrui. Il fait enfin
face à la réalité. Il pose les questions essentielles sur la
mort, la fragilité de l'existence et de l'amour. Il montre qu'il
faut vivre chaque minute comme si c'était la dernière. J'adhère
complètement à cette philosophie. Le bonheur, c'est, pour moi, une
vie sans mensonge et une succession de moments intenses.»
La spiritualité voilà bien aussi quelque chose d'essentiel dans
le quotidien de Tom Cruise. A 17 ans, il a d'ailleurs failli être
moine. Il est resté un an chez les Franciscains avant de réaliser
qu'il s'était trompé de vocation. Sa quête spirituelle et
identitaire l'a conduit ensuite à l'Église de scientologie comme
John Travolta. Il n'aime guère parler de cet engagement mais n'en
renie aucun principe. C'est, estime-t-il, «sa planche de salut»
après une enfance nomade et traumatisante. Son père, ingénieur
en électricité, alcoolique et violent, lui inflige en permanence
des coups de battes de base-ball, terrorise sa mère et ses trois sœurs.
Ses parents divorcent en 1975. Tom a 13 ans. Il devient alors chef
de famille. Il aide sa mère en vendant des journaux, en faisant la
plonge, le soir, dans les restaurants. Sans repère, à la dérive,
il manque aussi de tomber dans la délinquance. Il rêve d'être
acteur depuis l'âge de cinq ans mais il est dyslexique.«Je fais
partie de l'Eglise de scientologie depuis quatorze ans, dit-il. Elle
m'a aidé à prendre ma vie en main. A avoir confiance en moi. La
confiance en soi est la clé de la réussite. La scientologie m'a
permis aussi de sortir de ma dyslexie, d'assouvir ma soif
d'apprendre, d'explorer et de surmonter mes problèmes existentiels.
Mais je ne fais pas de prosélytisme. Chacun a le droit de vivre, de
croire, comme il l'entend.»
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